COMPRENDRE ET GÉRER SES MÉCANISMES DE DÉFENSE

Les mécanismes de défense, naturels, alliés pour surmonter une charge émotionnelle importante, une épreuve… les mécanismes de défense peuvent aussi devenir inadaptés et déséquilibrer l’individu dans sa vie courante.

 

Comprendre et gérer ses mécanismes de défense, pourquoi ?

Il est intéressant de connaitre l’existence des mécanismes de défense de par leurs rôles d’abord. Puis, car leur analyse offre une meilleure connaissance et compréhension à la fois de soi et des autres.

 

Comprendre et gérer ses mécanismes de défense débute par une définition !

« Mécanismes de défense » est une expression utilisée en psychanalyse.

Ce sont des barrières que nous érigeons pour nous protéger de quelque chose (d’une situation, d’une émotion…) ressentie comme déplaisante voire intolérable. Ils ne sont ni bons, ni mauvais, ils sont d’abord instinctifs et se mettent naturellement en place pour nous défendre.

Les mécanismes de défense concernent tout le monde, se considérant sain d’esprit ou souffrant d’un mal-être.

Ils ont deux fonctions :

  • Fonction de préservation de la cohésion de l’appareil psychique.
  • Fonction adaptative face au monde extérieur.

Ils se matérialisent par des stratégies mentales ou des comportements visant à protéger notre estime de soi, notre personnalité… d’une réalité que l’on ne veut ou ne peut accepter. C’est pourquoi lorsqu’ils sont adaptés, ils façonnent les « traits de caractère ».

 

Comprendre et gérer ses mécanismes de défense : image d’André et Lelord

 

« Ils fonctionnent comme des courtisans qui passeraient leur temps à dire : « Tout va très bien, Sire » à un Roi vivant reclus dans son palais alors que, au dehors, la révolution gronderait »

André et Lelord

 

Je vous propose cet extrait des mots de Christophe André et François Lelord pour imager les mécanismes de défense. Ils poursuivent « aucun effort de changement ne sera conduit par le souverain puisque les seuls messages qu’il accepte d’entendre sont ceux qui sont rassurants […]. D’une certaine façon, les mécanismes de défense représentent donc un troc inconscient au cours duquel les sujets sacrifient leur développement personnel contre un sentiment -factice – de sécurité ».

 

Comprendre et gérer ses mécanismes de défense : quand posent-ils soucis ?

 

Les mécanismes de défenses deviennent gênants lorsqu’ils :

– Prennent trop de place allant jusqu’à nous faire développer des états d’anxiété, de phobies, d’obsessions…

– Sont inefficaces, à noter que « L’efficacité adaptative d’un mécanisme de défense dépend de sa nature, mais aussi de l’intensité et de la souplesse de sa mise en jeu, et des circonstances. »(1)

Ne varient pas, ne sont pas souples, sont mal adaptés aux réalités internes et externes.

– Apparaissent trop fréquemment, ne sont plus temporaires.

Ne laissent plus place à des mécanismes de régulation, qui eux sont des mécanismes conscients sur lesquels on peut agir, travailler.

– Laissent passer les souffrances sous une forme déguisée comme des symptômes. Le corps peut alors devenir le biais de communication de la souffrance émotionnelle qui ne parvient pas à s’exprimer. On entre alors dans le cadre de la somatisation.

Se généralisent. La vie des êtres humains est gouvernée par la recherche du plaisir et la fuite de la souffrance. Ainsi, si un mécanisme de défense procure un soulagement à un moment donné, le cerveau va se souvenir de ce moment et vouloir le réitérer. D’un comportement utile initialement et de façon éphémère, on peut se sentir piégé et perdre la maitrise de ce qu’il se passe. Le mécanisme de défense devient en lui-même constitutif du problème. Ex : pallier au sentiment de solitude par le grignotage, ne pas risquer d’être abandonné, de souffrir en évitant de s’engager dans une relation, contourner son stress par la cigarette, le vapotage…

 

Comprendre et gérer ses mécanismes de défense seul(e), est-ce possible ?

Puis-je faire tomber les barrières érigées par mes mécanismes de défense seul(e) ?

 

 

Des mécanismes inconscients

Tout d’abord, les mécanismes de défense sont inconscients, il est donc important de comprendre que le risque est que l’introspection se heurte toujours à la censure.

Pour exemple, si l’on prend les « tests » de magazines que vous réalisez en vacances, entre ami(e)s… lorsque vous répondez à ces questionnaires, vos mécanismes de défense sont en jeu. Vous pensez répondre sincèrement alors que votre réponse n’est pas en lien direct avec votre personnalité mais ce que vous pensez être votre personnalité, vos intérêts… Bref vous restez sur le plan du « conscient ».

 

Une souffrance déguisée en plaisir

De plus, certains mécanismes de défense vont être gouvernés par la notion de plaisir et nous empêcheront de percevoir le problème qu’ils représentent (cf. plus haut).

 

Des mécanismes de défense adaptés ou inadaptés ?

Ensuite, « tout » peut être mécanisme de défense, il n’est donc pas simple de savoir quand il est utile de s’y pencher davantage, quand ils posent vraiment problèmes. Quelques questions simples peuvent tout de même vous aider à savoir si vos mécanismes de défense sont adaptés ou inadaptés.

Par exemple, toutes les sortes de comportements addictifs peuvent être des mécanismes de défense, le recours à l’humour également, ou encore, le besoin d’être toujours actif, de ne jamais rester seul(e), d’éviter toute prise de décision ou de tout vouloir contrôler…

On se demandera face à ces opérations mentales ou attitudes :

  • Pourquoi je fais cela ?
  • Est-ce que je me sentais bien avant de faire cela ? Si non, qu’est-ce qui n’allait pas ?
  • Est-ce que je fuis une émotion en le faisant ?
  • Est-ce que je ressens de la culpabilité à faire ou ne pas faire cela ?

 

Un recul, un point de vue différent

Enfin, bien entendu vous pouvez vite perdre le fil, manquer de recul et ne pas voir ce qu’une personne extérieure pourrait identifier de vos mécanismes de défense.

 

Comprendre et gérer ses mécanismes de défense avec l’aide d’un psy

 

 

L’expérience du thérapeute est parfaitement adaptée pour vous accompagner. Il est neutre, permet de libérer les affects et de prendre conscience de ce qui fait obstacle à votre avancement.

En lien avec le « a) Des mécanismes inconscients », en réalité, même en faisant la démarche de consulter un professionnel du psychisme, votre demande, vos objectifs peuvent ne refléter que la pointe de l’iceberg. Vous formulez une « demande consciente ». Il se peut que la pointe de l’iceberg ne soit pas la plus importante à observer.

Le thérapeute vous aidera à porter attention à ce qu’il y a en dessous, aux émotions que vous cherchez « plus ou moins inconsciemment » à anesthésier par exemple. Il vous accompagnera, vous aidera à y faire face et à les libérer. Ce rééquilibrage salutaire vous dégagera naturellement du/des mécanismes de défense inadaptés.

Mais alors quels sont ces mécanismes ?

 

Comprendre et gérer ses mécanismes de défense : un aperçu !

Les mécanismes de défense sont très nombreux, nous ne pourrons donc pas tous les citer ici.

Ils sont aussi plus ou moins complexe, nous aborderons les plus simples ou les plus connus.

Ils interviennent souvent à plusieurs donc ne doivent pas être pris isolément. D’autant qu’ils interviennent pour différentes expériences, situations, souvenirs, émotions…

Bref, l’idée ici est de rendre le plus accessible possible ces notions, non de dresser une liste exhaustive, détaillée des mécanismes et de leur fonctionnement.

 

Sublimation

Détournement d’une pulsion incompatible avec nos exigences sociales, morales ou éthiques en quelque chose d’acceptable voire de socialement valorisé et conforme à ces mêmes exigences. La pulsion s’exprime sous une forme déguisée.

Exemple : une pulsion agressive s’exprime via les sports de combat

 

Formation réactionnelle

Adoption d’un comportement radicalement opposé à celui accompagnant normalement le désir, la représentation réprimée.

Exemple : tendance à la saleté est transformée en obsession pour la propreté.

 

Déplacement

Sentiment ou réaction envers une personne transférée ou déplacée vers une autre personne, un objet ou un animal.

Exemple : un mari frustré au travail va se mettre en colère contre son épouse en rentrant chez lui, un enfant grondé par ses parents va s’en prendre à son frère…

 

Annulation rétroactive

Dans un premier temps, dire ou faire quelque chose dans un sens, pour dans un second, dire ou faire quelque chose de contraire, ayant pour vocation d’annuler cette première réaction.

Exemple : une personne formule des critiques acerbes contre quelqu’un pour finalement dire qu’il est quand même gentil, marrant…

 

Refoulement

Le souvenir, la pulsion pénible est maintenue hors du champ de la conscience car la confrontation à leur existence serait trop douloureuse.

Exemple : victime d’un traumatisme.

 

C’est un mécanisme qui consomme énormément d’énergie psychique de l’individu. Il se trouve alors fatigué, sa personnalité appauvrie… Lorsque le mécanisme s’affaiblit, les rêves, lapsus… peuvent survenir.

 

Déni

Le déni implique une part de conscient qui refuse de percevoir une part douloureuse et inacceptable de la réalité en la rejetant. A noter que cette part peut paraitre évidente pour les autres. La personne a besoin de temps pour l’accepter, elle annule donc un aspect dérangeant impliquant un conflit avec elle-même ou les autres.

Exemple : désir de ne pas savoir apparenté à la « politique de l’autruche » dans les dépendances.

Autre exemple : dans le cadre des rêves, une personne va pouvoir dire « cet homme n’est pas mon mari », le contenu du rêve est réprimé (l’homme dans le rêve est bien le mari), le déni lui permet de l’exprimer tout en le niant.

 

Projection

Attribution inconsciente aux autres de ses propres craintes, désirs interdits car y faire face serait source d’angoisse ou de culpabilité. Ce que l’individu ressent vis-à-vis de lui-même, il s’imagine que l’autre le ressent pour lui.

Exemple : vous vous apprêtez à partir en soirée et portez une robe dans laquelle vous vous sentez mal, vous dites à votre conjoint « Tu n’as pas besoin de me regarder comme ça, je sais que tu me trouves moche ! », au lieu de lui faire un grand sourire avant de sortir, et ce, alors même que vous ne connaissez pas sa pensée. Vous vous sentez mal dans votre peau, du moins dans cette tenue, donc vous projetez votre insécurité.

Autre exemple : vous ne vous sentez pas cultivé et commettez une erreur lors d’un jeu de culture générale entre amis. Bien que personne ne fasse de commentaire, vous vous sentez stupide et vous imaginez qu’ils vous considèrent également comme tel, inculte, inférieur… vous commencez à leur reprocher.

 

Et les autres ?

Comme évoqué plus haut, la quantité de mécanismes de défense est très élevée et il n’existe d’ailleurs pas de consensus sur leur nombre. Comme le rappelle Henri Chabrol dans son article sur cette thématique (1), deux classifications ont été suggérées :

  • selon leurs effets plus ou moins adaptatifs
  • selon leur cible principale, à savoir les émotions ou les pensées.

Toutes deux ont fait l’objet de critiques rappelant qu’il ne fallait pas méconnaitre la « relative unité » de ces mécanismes de défense.

Pour les trier, Henri Chabrol utilise l’échelle de fonctionnement défensif du DSM-IV constituée de 7 niveaux. Afin de simplement citer quelques mécanismes supplémentaires, nous nous intéresserons uniquement aux 4 premiers niveaux :

 

NIVEAUX ET EXPLICATIONS MÉCANISMES DE DÉFENSE
Adaptation aux facteurs de stress, valeur adaptative élevée autorisant la perception consciente des sentiments, idées, leurs conséquences. Mécanismes se rapprochant des « stratégies d’adaptation » les plus fonctionnelles.

 

Anticipation, affiliation, affirmation de soi, altruisme, auto-observation, humour, sublimation, répression
Inhibitions mentales ou de la formation de compromis (hors du champ de la conscience).

 

Déplacement, dissociation, intellectualisation, isolation de l’affect, formation réactionnelle, refoulement, annulation
Distorsion mineure de l’image de soi, du corps ou des autres (régulation de l’estime de soi, défense d’ordre narcissique). Dépréciation, idéalisation, omnipotence
Désaveu (maintien de pulsions, idées de responsabilité hors du champ de la conscience attribuées ou non à une cause extérieure) Déni, projection, rationalisation

 

Sources :

(1) Henri Chabrol, les mécanismes de défense, Recherche en soins infirmiers 2005/3 (N° 82), Pages 21 à 42

(2) https://nospensees.fr/le-deni-ou-le-desir-de-ne-pas-savoir/ 02/05/2017 (consulté le 09/06/2021)

(3) Amel Bouhenna – Les mécanismes de défense psychique – 20/08/2019 (consulté le 09/06/2021)

(4) Melinda Orset – Les mécanismes de défense : mieux les comprendre pour pouvoir s’en libérer – 22/08/2018 (consulté le 09/06/2021)

(5) 12 Mécanismes des défense inconscients Parties 1 et 2 – 24/07/2017 (consulté le 09/06/2021)